Guide sympathique pour démystifier le métier d’architecte paysagiste

Publié le 3 avril 2025

Travail qu'équipe chez Projet Paysage

©Élizabeth Gartside

Vous apprenez qu’un membre de la famille est architecte paysagiste. Vous l’imaginez aussitôt les mains dans la terre, à quatre pattes en train de poser du pavé ou le crayon à la main pour dessiner toute la journée. Qu’en est-il réellement ?

L’architecte paysagiste est un mammifère unique qu’encore peu de gens comprennent en dehors de la tribu professionnelle dans laquelle il ou elle évolue. En rencontrer un ou une suscite à tout coup des questionnements. On tente tant bien que mal de s’imaginer la vie secrète de l’architecte paysagiste…

« Tu es architecte paysagiste, ça veut dire que tu peux me conseiller pour sauver mon plant de tomates rabougri ? »

« Architecte paysagiste » n’est pas synonyme de « paysagiste » ou de « jardinier », au sens où sa tâche ne consiste pas à travailler directement les mains dans la terre. Par contre, sa spécialité mise sur la création d’espaces extérieurs, ce qui implique d’apprivoiser le potentiel de la nature en tant que matériau. Avant tout, l’architecte paysagiste se questionne sur le rôle de l’aspect végétal dans un projet donné. Au-delà de leurs qualités botaniques respectives, les végétaux sont sélectionnés et placés dans le souci de répondre à des besoins pratiques ou esthétiques — gestion des eaux, ombrage, intimité, filtration sonore ou visuelle, entretien simplifié, ambiance, etc.

Par intérêt, par passion ou par formation, certaines personnes possèdent des connaissances végétales plus approfondies qu’elles mettent avec plaisir au service du design. Cela dit, les architectes paysagistes ne connaissent pas forcément le comportement de chaque plante sur le bout des doigts ! Ce qu’ils et elles maîtrisent tous et toutes, ce sont les principes de biodiversité et de création d’écosystèmes, essentiels pour élaborer des milieux de vie agréables et fonctionnels.

Association des architectes paysagistes du Canada

« Les architectes paysagistes façonnent le monde qui nous entoure par l’analyse, la planification, la conception et la gestion de l’environnement naturel et bâti. » 

Plates-bandes et bancs pour s'asseoir

Maison de Radio-Canada ©Vincent Brillant

Passerelle sur pilotis menant vers un abri

Parc de conservation Ruisseau de Feu ©Vincent Brillant

L’architecte paysagiste conçoit des environnements extérieurs en tous genres : places publiques, parcs, cours d’école, promenades, spa, milieux hospitaliers, centres de villégiature, cours d’habitation immobilière, etc. Son terrain de jeu est vaste et les végétaux répondent à des objectifs multiples, qu’ils soient existants ou implantés sur le site. 

Par exemple, pour le parc Rosemont, cela signifie de conserver un maximum d’arbres matures et d’ajouter des espèces qui renforcent la résilience climatique du quartier. La microforêt procure en outre aux citoyens et citoyennes des zones d’ombre. La clairière de trèfles offre quant à elle une superficie toute désignée pour se lancer le ballon. Dans l’ensemble, le recours à une diversité de plantes assure une rotation harmonieuse des couleurs et des textures au fil des saisons. 

Dans le cadre du Jardin d’Atholstan, dans le centre-ville de la métropole, les objectifs diffèrent. Cet espace fait référence à un journaliste et homme d’affaires influent de Montréal, fondateur du journal The Montreal Star. La verdure au profil bas renforce une esthétique sobre et une sensibilité artistique cohérente avec la valeur patrimoniale du projet. Un amélanchier agrémente le tout avec une jolie floraison, un arbrisseau idéal pour une zone ombragée.

Vue aérienne du Parc Rosemont à Montréal

Parc Rosemont ©Vincent Brillant

Jardin d'Atholstan

Jardin d'Atholstan ©Vincent Brillant

Quel que soit le mandat, la nature fait partie des considérations de l’architecte paysagiste dans l’objectif de favoriser le bien-être des collectivités à partir des contraintes et qualités de l’environnement. 

Dans l’équipe, le savoir de nos experts et expertes en végétaux nourrit la réflexion collective en apportant une perspective unique et pointue, qui renforce la portée des projets. Ce regard singulier est fort apprécié autour de la table.

« Tu es architecte paysagiste, donc tu peux m’aider à poser le pavé autour de ma piscine ? »

Ah, voilà que vous confondez l’architecte paysagiste avec ces gens qui concrétisent sa vision sur le terrain. La confusion est légitime.

Choisir un type de pavé et sa configuration représente l’une des décisions des spécialistes en conception paysagère. Sa couleur, sa texture, sa composition, son niveau de perméabilité, etc. orientent la sélection. Ces paramètres doivent convenir à l’esthétisme et la fonctionnalité recherchés, comme la nécessité d’avoir une surface facile à entretenir, capable de supporter certaines charges ou susceptible de diminuer l’impact des îlots de chaleur. La pose du fameux pavé, plus spécifiquement, est effectuée par l’entrepreneur général à qui il ou elle donne le relais.

En réalité, l’architecte paysagiste réfléchit en amont à tous les enjeux à considérer pour favoriser une expérience optimale du lieu. Il est question d’accès au site, de flux de circulation, d’entretien, d’ambiance, de gestion des eaux de ruissellement, de nivellement, d’intégration du patrimoine, par exemple. Tous ces aspects sont considérés dans la planification du projet, peaufinés en collaboration avec les autres quarts de métiers, incluant architectes, ingénieurs et entrepreneurs.

Esquisses à la table à dessin

©Élizabeth Gartside

Dalles de ciment aux tons de blanc et chemins pavés en gris

Parc Philippe-Villeneuve ©Vincent Brillant

« Tu es architecte paysagiste, alors pendant l’hiver, tu fais du déneigement ? »

Eh bien non. L’architecte paysagiste se terre généralement dans le même repère été comme hiver. Il y a suffisamment d’ouvrage pour l’occuper toute l’année ! Les bureaux représentent sa tanière principale, puis les chantiers ponctuent son parcours lors des saisons douces.

Son quotidien varie entre différentes tâches afin de mener à terme les trois grandes étapes de chaque projet.

  1. La conception. Cette phase est celle où émerge la vision du site. Avec ses collègues, l’architecte paysagiste imagine un espace accueillant, pratique, esthétique, singulier… Les idées fusent, une esquisse se dessine. Un concept émerge. Le tout est mis au propre en 3D pour valider l’échelle, les espaces, les vues, la coloration, les textures et la volumétrie à présenter au client.
  2. Les plans et devis. À cette étape, l’architecte paysagiste trouve des façons précises de concrétiser sa vision. Les matériaux, les dimensions et le mobilier, pour ne nommer que ces aspects, sont alors sélectionnés auprès de fournisseurs. Les choix doivent répondre aux contraintes logistiques — comme le dégagement nécessaire pour déneiger l’accès piétonnier à un bâtiment — et financières du mandat. Les décisions sont prises à la lumière de discussions avec les autres professionnels, comme les architectes et ingénieurs.
  3. La surveillance de chantier. Les plans deviennent enfin réalité ! L’architecte paysagiste se rend sur place pour s’assurer que tout se déroule bien et correspond à la vision développée. Si des imprévus ou des contraintes techniques émergent, le mode solutions s’active et tout changement est communiqué aux personnes concernées. L’objectif ? Garantir la qualité, la cohérence et la viabilité du site jusqu’à sa réalisation finale.
Esquisse Carré Augier

Esquisse – Carré Augier ©André Gatien

Rendu 3D Carré Augier

Rendu 3D – Carré Augier ©André Gatien et Iona Sobral

Détails de construction

Détails de construction – Carré Augier ©André Gatien

Chantier Carré Augier

Surveillance de chantier – Carré Augier 

« Tu es architecte paysagiste, donc tu passes tes journées à dessiner ? »

Plusieurs journées, oui, et on y prend vraiment plaisir ! Le dessin fait partie des tâches de l’architecte paysagiste, sur papier et à l’écran. Or, son quotidien est varié. Il comprend une grande part de créativité qui se manifeste via les esquisses, certes, mais aussi la résolution de problèmes, la coordination, la gestion budgétaire… Il faut également savoir convaincre autrui (promoteur immobilier, instance gouvernementale, etc.) de sa vision, une mission qui s’appuie sur le visuel, les calculs, les mots.

Bref, ce mammifère polyvalent qu’est l’architecte paysagiste touche à une foule de choses. Pour quiconque entend parler de ce métier pour la première fois, l’intersection entre l’architecture et le paysage semble surprenante ! Et pourtant, les traces de son travail sont partout, sans même qu’on s’en rende compte. On emprunte instinctivement un corridor floral invitant, qui agrémente notre trajet vers la bibliothèque… On s’assoit sur un banc de parc stratégiquement placé à l’ombre pour regarder ses enfants explorer la rivière sèche qui, elle, accueille les pluies abondantes. On dépose notre serviette sur un crochet avant d’entrer dans un spa dont l’orientation met en valeur la vue et dont l’aménagement angulaire propose des zones d’intimité. On s’allonge confortablement au bord de la piscine de l’immeuble pour profiter du soleil sur le mobilier sur-mesure.

Il suffit d’apprivoiser l’architecte paysagiste pour réaliser qu’il s’agit d’un être rigoureux et créatif qui apporte fonctionnalité et beauté dans le quotidien ! On ne s’en passerait plus. La vie secrète des architectes paysagistes n’a finalement rien de très secret, elle est exposée aux yeux de tous et toutes chaque jour.

Collègues au travail devant la vue du Mont-Royal

©Élizabeth Gartside

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